Apprendre...

14:37

Je ne sais pas si je parviendrai à la fin de ce texte (finalement si, puisque tu es en train de me lire, mais je n'avais pas envie de reprendre mon début...), tant je suis encore amochée par ce que j'ai vécu samedi dernier. Les mots prennent place néanmoins, il doit en être ainsi, la douleur ne peut être tue.
Le vocabulaire employé peut laisser craindre le pire. Mais non. Point d'agression ou d'accident dans mes archives. Une drôle de séance plutôt qui a agité bien des choses. Sans attente aucune, je suis entrée en résonance, à la manière de ces ponts qui réagissent aux ondes environnantes et qui ne cessent d'amplifier leur mouvement.

Que je te pose la situation : atelier photo d'une journée, les bases de la photographie culinaire. Comme beaucoup, je m'attendais à un cours plutôt technique. Enfin comprendre tous les boutons et sigles qui s'agitent sur mon appareil tout neuf, telle était mon ambition.

Rien ne se passe comme prévu.

La parole régna en maîtresse au fil de ces heures, entrecoupées de quelques précisions et questions plus matérialistes, mais sans s'aventurer jamais bien loin des mots et ressentis.

"Que veux-tu photographier ?"
"Quel goût te plaît dans ce plat ?"
"Quelle émotion souhaites-tu partager ?"

Voici mon apprentissage.

Et ma douleur.

Car je ne le sais pas (au cube).

Je sais ce que je veux taire : ma boulimie latente, la perte du goût au profit du volume, la peur du gras, la hantise de manger des heures à l'avance. Seule la complexité domine ici.
La nourriture est mon ennemie, comment veux-tu que je photographie ça ?
Surtout, comment faire envie avec une telle répulsion à l'intérieur ?

Alors, je triche. Je fais du "stylisme" culinaire en cachant les aliments derrière des mises en scène et des constructions d'image. Du coup, il n'y a pas de vie dans mes photos. Seulement du plastique.

Pas tout le temps, évidemment. Mais cette évidence m'a sauté à la gorge, m'a retourné l'estomac, a touché du doigt un noeud profond.

Après la noyade, vint la bonne résolution : faire plus simple, aller à l'essentiel de ce que j'ai sous les yeux. Essayer de savoir ce qui me plaît et le saisir. Je connais bien la satisfaction de la cuisinière, de celle qui fait pour les autres, il va me falloir davantage penser à moi.

Finalement, je reviendrai peut-être au même "style", mais ce sera plus conscient. Et le chemin fait vers le plaisir et la bienveillance ne pourra être que bénéfique.

Du plaisir donc dans ce qui suit. Ou comment retrouver le goût des rollmops dans une tartinade végétale et détourner des poires.


Tartinades végétales

Un air de Rollmops

 

Pour un bol

100 g de tofu soyeux (ou 50 g de tofu ferme et 1/2 brique de soja cuisine)
2 gros oignons
3-4 cornichons à l'aigre-doux
2 cc de moutarde
1 cs de sucre roux
1 cc de vinaigre de cidre
poivre blanc et sel

Peler et émincer les oignons. Les faire revenir dans une poêle sur feu vif avec un peu d'huile neutre. Ajouter le sucre et bien mélanger. Laisser confire à feu doux.
Déposer les oignons cuits dans le bol d'un robot mixeur avec la moutarde, une pincée de poivre blanc, une pincée de sel et le vinaigre de cidre. Mixer une trentaine de secondes.
Ajouter le tofu et laisser tourner le mixeur 2-3 minutes.
Transvaser la préparation dans un bol.
Débiter les cornichons en petits morceaux et les incorporer à la crème. 

Envie de poires


Photo à la bougie...j'ai quand même glané quelques notions techniques. ^^ 

Pour un petit bol

2 poires 
5 cl de vinaigre de cidre 
2 cs d'eau 
2 cs de sucre 
sel/poivre
quelques feuilles de menthe

Laver et peler les poires. Les couper en cubes et les déposer dans une petite casserole. Ajouter le vinaigre, l'eau et le sucre et laisser compoter sur feu doux.
Quand les fruits sont bien tendres, réduire en purée à l'aide d'un mixeur plongeant.
Saler, poivrer.
Laisser refroidir.
Laver quelques feuilles de menthe et les émincer finement. Ajouter l'équivalent d'une grosse cs dans la compote de poires (à doser selon son goût).

Petite précision copyright'esque  : je me suis ici largement inspirée d'une recette de Céline d'Artichaut et cerise noire.

Je présente ces tartinades en apéritif, sur un pain noir ou des pains polaires (dans les deux cas, je suis à la lettre les recettes du Comptoir des pains, aux éditions Marabout... ma MAP's bible!).
tartinade, rollmops, cornichons, poires, aigre-doux 


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16 commentaires

  1. Et ben... je n'avais pas réalisé ce rapport difficile à ce point avec la nourriture (tes photos masquaient bien) ! C'est sûr qu'en pacifiant ta vision de l'alimentation, tout deviendra plus joyeux, plus facile, je suis passée par là... Mais aujourd'hui je photographie mes plats avec envie et plaisir.

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  2. Effectivement, très étrange ce que tu décris là...mais le plus gros du chemin, tu viens de le faire, puisque tu as mis des mots/maux sur ton ressenti !
    A toi (et à nous donc ;)), la photo 'plaisir et liberté' de la nourriture !
    N'empêche, j'aurais bien aimé le faire ce petit atelier ;)

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  3. Ta description de l'atelier m'a également fait me poser beaucoup, beaucoup de questions sur mes images. Résultat, heu, rien, je n'arrive plus rien à photographier ! Je me dis que c'est bon signe et je me console avec le souvenir de ces superbes tartinades.
    J'ai fait la rollmops (une petite merveille) avec 75g de tofu lactofermenté et un peu d'eau.
    Ne te laisse surtout pas abattre (ou alors rebondis-nous bien vite !) ça va faire son chemin dans ton esprit et te laisser tranquille ensuite par magie. Et je soutiens que les contraintes techniques sont vraiment importantes quand on fait des photos dans nos conditions... elles ne nous aident pas à focaliser sur le plus important.

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  4. très beau post Tombouctou, très touchant...
    au plaisir de découvrir ton évolution photographique ! comme dit BiOna, rebondis-nous vite !

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  5. Ah la photo culinaire! Pas facile de toujours transmettre ce que l'on voudrait. Moi je voudrais bien d'une de tes petites tartinades, celle qui a un air de rollmops me parle plutôt (même s'il est un peu tôt..)

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  6. L'avis (ou la vie) d'une maman : merci pour ton gentil metit mot et ton passage par ici.

    Mlle Pigut : je masque tout très bien. :D
    Au fait, ces tartinades sont pour toi !

    L'Ano : effectivement. J'ai hésité à partager mon ressenti. Mais y arriver doit bien être un signe plutôt positif...?
    Pour le cours, je te raconterai. :)

    BiÔna : zut, je suis navrée. Après un gros passage à vide chez moi aussi, je suis revenue aux photos. Sans l'impératif de bloger derrière. Juste pour tester une configuration, une idée... Et j'ai refait de la rollmops !! ^^

    Agnès : Merci beaucoup. Et il ne faut pas trop t'inquiéter : après le refoulement des émotions, le rebond est ma 2ème spécialité !

    B.Wak : ah, si seulement les appareils photos pouvaient lire nos pensées ! ce serait tellement plus simple... Mais je crois que toi, tu es déjà bien avancée sur ce chemin. :)

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  7. Depuis le stage j'avoue voir repris l'appareil mais j'étais angoissée,
    J'ai donc refait des photos en essayant de me souvenir des minces infos que nous avons eues. Résultat d'après jean Pierre c'est mieux mais j'ai une drôle de sensation! As tu vu le post de chef Nini où elle fait un petit briefe assez complet ( plus que ce que nous avons ) Macaronette se lance elle aussi dans un blog sur la photo. Tu dois avoir mon mail si tu veux plus d'infos.
    allez courage on va y arriver!!!

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  8. Chez moi, c'est l'inverse : aucune technique mais un poil de poésie dans tout ça. Parfois. Quand je suis en forme ^^
    Elles sont très belles tes photos et elles me donnent envie de déguster à petites et lentes bouchées ce que tu cuisines... C'est ptêt pas le but recherché, mais ça me touche et ça me fait du bien :)

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  9. Voilà qui est bien personnel... Mais les accouchements (de soi) ne se font jamais sans la douleur...

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  10. Sophie : merci beaucoup pour ton message. Je suis déjà épatée que tu ais pu me retrouver. :)
    Avec un peu de recul, je crois que c'était plutôt un bien d'être chamboulées, remises en question... C'est à partir de là que nous pourrons évoluer, pas en restant à l'abri de nos acquis.
    Au plaisir de te recroiser.

    Julhya : si, si, c'est exactement le but au départ. Donner envie. Alors, savoir que ça marche pour toi, c'est énormissime !!!!

    Laurent : l'écriture (m')aide bien à amortir la douleur nécessaire. Quelques fois, un bout de tripe dépasse... on verra bien si quelque chose de positif sort de ce grand chamboulement.

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  11. Hello Tombouctou, vive les tartinades et la qualité sur la quantité ! Et ne t'en fais si ce n'est pas toujours ça, c'est le travail d'une vie de manger en paix ;)

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  12. Merci de nous faire partager cet article, le rapport que l'on entretient avec l'alimentation n'est pas toujours simple.

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  13. Lu et relu ton post... quand la nourriture se transforme en ennemie...ton blog devient un magnifique tour de force sous cet éclairage (j'étais déjà admirative pourtant !) et la photographie culinaire comme une thérapie c'est beau !
    Bon rebond et belles photos à venir !
    Isabelle.

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  14. Mathilda : le tofu soyeux vaincra ! ;)

    Gaëlle : Merci à toi d'apprécier ce partage.

    Zazouille : je commence à regarder mes carottes d'un autre œil. Je n'aurai jamais cru que l'objectif puisse être un bon médiateur. Un grand merci pour tes encouragements !

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  15. Quel merveilleux texte... c'est si complexe aujourd'hui le rapport à la nourriture... tu as mis les mots justes, parfaits... enfin bref je me retrouve.

    Ton blog est génial mais tu as raison, la plastique on est plusieurs à s'y réfugier. Je me suis souvent dit que pour ne plus me détester de ne pas agir assez, je préférais être observatrice et donc photographier. Mais comme l'a dit très justement a Chicken in the Kitchen, les accouchements de soi ne se font jamais sans douleur.

    Alors du courage face à la douleur, et des éclaircies, car vraiment, quel beau blog tu as créé.

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